Le premier jour du reste de ma vie,

Publié le par philippell

ou De battre mon coeur s'est arrêté...

 

    Côté musique, nous ne sommes pas terribles, mais côté ciné, c'est pas mal. En tout cas, quelque soit le titre que l'on choisi, tout s'est décidé ce 14 mars.

   Même si l'issue semblait inéluctable, lorsque ça arrive, ça fait mal. On s'y prépare, on s'organise mais malgré tout, souffrance il y a.

   Paradoxalement, ce fut comme un soulagement, une fin à cette terrible période qui commença le 3 octobre. Des jours, des semaines, des mois, une éternité.

   Des semaines passées tout d'abord à attendre une amélioration, un éventuel retour où tout simplement une fin.

   Puis, un retour annoncé, un espoir qui revient malgré une mémoire, une intelligence si active qui a disparue sans espoir de retour, elle...

   L'emploi du temps s'adapte, tout tourne autour des horaires d'ouvertures des services de réa où autres services. Des dizaines de sandwichs avalés en conduisant car tout moments gagnés est un instants pour lui, un soutient. La voix revient et une terrible révélation avec.

   Il avait raison ce jeune interne du Chu de Valencia lorsqu'il nous annonça ce que nous constatons en ce début décembre. Je ne suis plus rien pour lui, je n'ai jamais existé. Je ne suis que ce Monsieur qui vient tous les jours, cette personne qui se donne corps et âme pour cet homme qui semble seul dans son monde.

   Tant pis. Donner, toujours donner, même si cela semble vain. Il ne mange plus, ne mangera plus. Il ne marche pas, ne marchera plus. Toutefois, je persévère comme un devoir, une nécessité, un plaisir. Les conversations complètement dénuées de trame et de sens me plaisent ou plus simplement,  je m'en accorde . Elles sont de toutes façons beaucoup plus intéressantes que celles que je subit tous les jours dans ce lieu de travail que je n'aime plus, que je rejette tant il est à des kms de mes convictions professionnelles.

   Je n'ai qu'une priorité en dehors de ma famille. J'y donne toute mon énergie. Je lui donne mon amour de fils et mes compétences d'homme pour m'occuper des choses matérielles.

   Début janvier, je deviens son tuteur. Cette passation "de pouvoir", ce renversement de situation intervient au moment où son état se dégrade et au moment où je négocie ma rupture de contrat prof. Tout fout le camp. Pas mon abnégation. Je lutte, encore et toujours. Il se trouve à 30 kms de mon futur ex boulot mais bientôt sera à 60 de mon ancien job. Il faut le rapprocher.

  Le silence devient un acte principal dans les moments si puissants que nous vivons. Il ne se passe rien et pourtant les moments semblent trop courts.

   Le 28 de Février, jour si important dans notre vie marque la fin de ma courte aventure salariale et son retour proche de mon domicile. Tout sera plus simple dorénavant avec du temps libre pour encore plus de présence.

  La situation s'améliore aussi vite que son état se dégrade. Mutisme complet, paralysie rampante et infection grandissante. La fièvre s'installe et le souffle s'en va. Une semaine plus tard, une semaine après son arrivée proche des ses petits enfants, le voila repartit vers la case départ, la même que le 3 octobre.

   La boucle est bouclée. Il était loin, il s'est comme rapproché. Je le vois comme ça et ça me plaît. Entre 38 et 40 pour un homme valide, c'est fatiguant. Pour un être affaibli, usé, c'est mortel.

   L'inactivité professionnelle me permet de passer du temps avec lui, de le veiller, de longues heures en cette semaine dont je me refuse toutefois à croire que se sera l'ultime.

   Le 14 mars à 14h30, je me suis inscrit au pôle emploi. Ensuite j'ai passé 3 belles heures avec lui. Je suis rentré à la maison pour passer du temps avec les miens. Il s'est mort à 19h30.

   72 heures avant, après un ultime tête à tête avec son médecin, je suis revenu dans sa chambre sans oser le regarder. Je venais d'autoriser le médecin à le mettre sous morphine pour le soulager, l'aider. Ce soir là, je lui ai tout dit. J'ai vécu l'un des moments les plus terribles de mon existence.

   Tout ce qui a suivi ne m'a pas parut plus dur, ni même plus triste. J'avais touché le fond avant.

 

    A force de vouloir l'aider, le porter, il m'a quelque peu entrainé dans sa chute. Mais il fallait le faire, il fallait que je le fasse pour lui, pour moi. Je ne retiendrais que des moments magnifiques, d'une rare intensité émotionnelle. Remonter la pente sera facile. La vie continue. Je n'ai plus personne derrière. Ma vie, les miens sont devant.

   Merci pour tout Papa.

   Merci à tous ceux qui nous auront soutenu durant ces 6 mois de lutte.

 

 

Publié dans Mes news

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B
<br /> <br /> Mon cher Philll,<br /> <br /> <br /> Tes écrits sont très touchants et a te lire, on se rend compte que tu es vraiment quelqu'un de bien. Comme l'a dit Pat, les mots ne servent pas à grand chose dans ces cas là, néanmoins je te<br /> présente toutes mes condoléances.<br /> <br /> <br /> Antoine.<br /> <br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> Très touchant Philippe, merci de nous faire partager tout ça...<br /> <br /> <br /> Ca fait du bien de lire ce genre de chose !<br /> <br /> <br /> A très bientôt !<br /> <br /> <br /> <br />
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P
<br /> <br /> Merci mon Pat.<br /> <br /> <br /> <br />
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I
<br /> <br /> Mon cher PHiLL<br /> <br /> <br /> Que d'épreuves la vie nous fait t'elle subir......<br /> <br /> <br /> Ces moments influs a jamais sur nos actions a venir . Ton pére peut desormais etre en paix a toi le flambeau .<br /> <br /> <br /> Les mots sont vains parfois , et si importants quand on touche le fond .<br /> <br /> <br /> Je t'embrasse mon ami . <br /> <br /> <br /> pat<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Ps:<br /> <br /> <br />  je suis certain que l'on oublis jamais un fils comme toi<br /> <br /> <br /> <br />
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